AQUIDEAS

(7^ième partie)

     Entre la deuxième² et troisième³ mission d'assistance en Amérique Latine, l'un de nous se rendit pendant trois années au Royaume-Uni pour réaliser un Ph.D. (doctorat) en biologie marine. Il fût à nouveau contraint de s’exprimer dans la langue de Shakespeare, mais ...quelle nouvelle opportunité de pouvoir perfectionner cette subtile et importante langue internationale !

     A cette époque, encore peu d'institutions d'enseignement supérieur au niveau du 3^ième cycle délivraient ce pourquoi il était prêt à se consacrer ! Étant donné l’importance commerciale, des connaissances approfondies étaient maintenant requises en nutrition de crustacés dont les (grandes) crevettes faisaient partie. Comme beaucoup étaient « (sub)tropicales », les "Marine Sciences Laboratories" de l' University of Wales⁴ (à Menai Bridge, sur l’île d'Anglesey, au Pays-de-Galles) s’étaient équipés d’une écloserie "tropicale". Ses parois étaient isolées thermiquement et il y avait des Fishtanks⁵. L’eau de mer était chauffée au moyen de grosses résistances électriques ...fonctionnant toute l'année (pas très économique, mais au moins fonctionnel). Trois espèces de crevettes (Penaeus japonicus, P. monodon et P. merguensis) y étaient maintenues pour la reproduction et les expériences. Les géniteurs provenaient de régions tropicales et ces crustacés présentaient tous un grand intérêt commercial.

     Aujourd'hui, nous mettons des gambas Charentaises du type P. japonicus sur le marché français !

     Ce fût une autre période de découverte intense puisqu'il dût notamment observer l'appareil digestif de ces grandes crevettes à tous les stages de son développement, depuis les larves (en passant par les post-larves et juvéniles) jusqu’aux adultes. Cette évolution fit comprendre l'importance sélective des aliments à suppléer : tout est lié à la « grandeur » (dimensions) des particules alimentaires (considération purement "physique", pour pouvoir être ingérées en bouche) et à leur « composition » (considérations nutritionnelles) en relation avec les besoins nutritifs de l’espèce testée et l'absence ou la présence de certains organes internes. De nombreuses analyses de nutriments essentiels (tels les acides gras) par "gaz-chromatographie"⁶ et examens de sections anatomiques de leur tract digestif furent observés au microscope électronique, principalement dans les premiers jours de leur croissance.

     C'était réellement enrichissant pour la mise en relation, la compréhension et la comparaison (avec d’autres animaux) des mécanismes de la digestion ! Curieusement, certaines analogies purent être ainsi observées, notamment avec notre propre appareil digestif. Par exemple, les villosités (qui absorbent les nutriments) observées sur certaines parois internes de l’appareil digestif des crevettes adultes sont pratiquement les mêmes que celles trouvées dans celui des humains...

     Mais l'approche donnée aux études était fort différente de celle suivies aux USA. En Grande-Bretagne, la recherche y était plus fondamentale, mais les restrictions budgétaires y étaient aussi plus marquées, même si d'un point de vue référencielle elle était bien dotée. Cette troisième thèse fût écrite durant une quatrième année passée à Dublin. Lors de la défense orale de cette thèse, un des membres du jury (qui enseignait à Stirling University en Ecosse, autre prestigieuse institution dans l’enseignement aquacole) s'étonna de l'importance du travail fourni ...mais pour l'auteur ce n'était que l'aboutissement d'une compréhension essentielle directement applicable sur le terrain ! Car pour lui, les études spécialisées doivent - dans la majorité des cas - être mises au service des applications sur le terrain.

     Pour financer en partie cette nouvelle spécialisation, il travailla entre autres durant ses temps libres pour un hôtel de la région et refit une bonne partie de son énorme jardin: il y avait là de beaux arbres, des arbustes, des plantes et de superbes fleurs. Il y avait également des allées qu'il fallait constamment désherber ...à la binette ...sans pesticide. Enfin, l'esprit de créativité était au rendez-vous, car les suggestions ne manquaient pas pour mettre une touche personnelle quant aux rosiers ou autre nouvelle plate-bande à proposer. Mais de ce côté-là, les gérants de la bâtisse faisaient confiance, car ils étaient également propriétaire d’un B&B⁷ dans lequel notre « jardinier » avait séjourné à son arrivée (en attendant de trouver un logement indépendant) et il s'était lié d'amitié avec eux !

     Ce travail rémunérateur était un retour à la nature-mère, tellement nécessaire à l'homme pour son propre équilibre !

     Le Pays-de-Galles est une curieuse région du Royaume-Uni (ce dernier est aussi composé de 3 autres territoires: l'Angleterre, l’Écosse et l'Ulster ou la partie nord de l'île irlandaise). C'est non loin de Menai Bridge que se trouvait la petite ville Galloise possédant le nom le plus long d'Europe, avec 58 caractères et 51 lettres (car en alphabet Gallois, les "ch" et "ll" ne comptent chacun que pour une seule lettre) ...à la prononciation casi impossible : " Llanfair­pwll­gwyn­gyll­go­gery­chwyrn­drobwll­llan­tysilio­gogo­goch ".

     Dans ses villes côtières isolées, on peut notamment se balader sur des "piers" (quais) aménagés. Ce sont généralement de très belles avancées en mer, construites en pierre et fer forgé, ciselé pour en donner une ferronnerie très esthétique ...une vue très agréable pour le promeneur-observateur. On y trouve de petites échoppes touristiques et des kiosques en face desquels sont installés tables et chaises où l'on vous sert le thé ...tellement typique dans les habitudes anglophones.

     Il y a aussi de nombreux châteaux fortifiés dans la contrée, comme celui de Beaumaris sur l'île d'Anglesey, et celui de Caernarfon sur la côte du Comté de Gwynedd (voisin de celui d'Anglesey), tout deux datant du XIII^e siècle. Ces impressionnants vestiges, qui font partie du patrimoine national, montrent à quel point cette région se trouvait au centre de conflits il y a quelques siècles.

     Il y a une très belle ascension à réaliser sur la plus haute montagne de la région, le Snowdon, d'à peine 1.085 mètres, mais comme sa base se situe presque au niveau de la mer ...ce mont impressionne ! Un petit train à crémaillère peut vous emmener non loin de son sommet et au retour vous pouvez faire la promenade (2-3 heures) par le sentier du marathon annuel pour en admirer des vues imprenables.

     Enfin, le folklore Gallois est typique et très coloré, mais nous l'avons trouvé un peu sévère ...même si leurs danses sont fort belles. Avec leurs grands chapeaux noirs et vêtements rouges et blancs aux grandes dentelles, il forme un pilier de la vie sociale qui s'est installée depuis très longtemps entre toutes ces vieilles pierres et vallées où souffle fréquemment des "galles", c'est-à-dire de grands vents, qui s’engouffrent ...d'où le nom de "Pays de Galles" !

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